Le groupe GlaxoSmithKline (GSK) est l’un des principaux producteurs de produits pharmaceutiques au monde. Sa filiale espagnole Glaxo Wellcome a mis en place de nouvelles conditions générales de vente en mars 1998 ayant pour objet de limiter les possibilités de commerce parallèle entre l’Espagne et les autres états membres de la Communauté.

En vertu de ces conditions générales, les médicaments vendus aux grossistes espagnols le sont selon une politique de prix différenciés en fonction du système national d’assurance maladie qui les prend en charge.

La notification de ces conditions générales par GlaxoSmithKline à la Commission a donné lieu à une décision d’interdiction, la Commission européenne y voyant une entente anticoncurrentielle au sens de l’article 81 § 1 du Traité CE.

GSK a donc saisi le Tribunal de première instance des Communautés européennes.

1. Les conditions générales de vente de GSK constituent un accord entre entreprises n’ayant pas nécessairement pour objet de restreindre la concurrence…

Tout comme la Commission, le Tribunal considère que les conditions générales adoptées par GSK entrent dans le champ d’application de l’interdiction des ententes illicites. En l’occurrence, l’accord de volonté entre GSK et ses clients s’est manifesté par l’échange de copies signées des conditions générales de vente prouvant l’acceptation mutuelle.

Sur la question de l’existence d’une restriction de concurrence, le Tribunal invalide le raisonnement de la Commission selon lequel les conditions générales de vente ont pour objet de porter atteinte à la libre-concurrence en limitant le commerce parallèle des médicaments.

Bien que la jurisprudence ait depuis longtemps reconnue que « des accords visant en définitive à interdire le commerce parallèle doivent en principe être considérés comme ayant pour objet d’empêcher la concurrence » (arrêt de la Cour du 13 juillet 1966, Consten et Grundig), la Commission doit se livrer à une analyse du contexte juridique et économique de l’accord afin de vérifier cette présomption.

Or en l’espèce, elle n’a pas suffisamment pris en compte les particularités du secteur pharmaceutique, où les prix de certains produits sont fixés ou contrôlés par les États membres.

Dès lors, en mettant en avant l’objet anticoncurrentiel de l’accord comme elle le ferait en l’absence d’une telle réglementation, la conclusion principale de la Commission est erronée.

2. … mais dont l’effet est défavorable aux consommateurs.

Le Tribunal valide toutefois la conclusion subsidiaire de la décision attaquée selon laquelle dans le contexte propre aux produits pharmaceutiques, les conditions générales de vente de GSK ont pour effet de priver les consommateurs des avantages qu’aurait généré le commerce parallèle des médicaments en cause.

Les conditions générales de vente de GSK, en instaurant un système de prix différenciés empêchent la participation des grossistes espagnols à la concurrence intramarque sur les marchés nationaux de destination du commerce parallèle d’origine espagnole.

Partant, les consommateurs sont privés des bénéfices en terme de prix et de coûts des médicaments qu’aurait engendré la libre concurrence.

Cependant, tout accord illégal peut être « sauvé » en application de l’article 81 § 3 du Traité CE si ses effets positifs (amélioration de la distribution, progrès technique…) compensent l’atteinte portée à la concurrence.

La Commission a considéré en l’espèce que les conditions d’octroi d’une exemption n’étaient pas établies.

Là encore, le Tribunal estime que la décision attaquée révèle une insuffisance dans l’analyse économique et juridique. En particulier, la question de savoir si les conditions générales de vente pourraient engendrer un avantage économique en contribuant à l’innovation, qui joue un rôle central dans le secteur pharmaceutique, n’a pas été suffisamment approfondie.

Le manque de justification par la Commission de sa décision conduit les juges à annuler celle-ci en ce qu’elle rejette la demande d’exemption de GSK, obligeant la Commission à réexaminer cette demande.