Cass. soc. 24 juin 2014, n°13-10-301 à 13-10-304

La Cour de cassation accroît une nouvelle fois l’insécurité juridique pesant sur les entreprises françaises !

Une société avait conclu en 2004 avec ses délégués du personnel un accord atypique instaurant un repos remplaçant le paiement de certaines heures supplémentaires et leurs majorations. Cet accord était parfaitement conforme aux dispositions de l’article L.3121-24 (anciennement L.212-5 II) du Code du travail.

Peu de temps après, une UES fut reconnue entre cette société et d’autres, un délégué syndical étant désigné au sein de cette nouvelle UES. Ces sociétés ont ensuite fusionnées.

Certains salariés ont saisi le Conseil de prud’hommes afin d’obtenir le paiement d’heures supplémentaires au titre des années 2005 et 2006.

Contestant la décision des juges du fond ayant fait droit aux demandes des salariés, la société se pourvoit en cassation et elle est déboutée. La Cour de cassation estime en effet que faute de procurer un avantage aux salariés, l’accord conclu avec les délégués du personnel ne constitue pas un acte soumis aux règles de dénonciation des engagements unilatéraux.

L’accord devient donc immédiatement caduc après que les conditions de son existence ont disparu par suite de l’assujettissement de l’entreprise à l’obligation annuelle de négocier dès lors qu’il ne lui a pas été substitué un accord collectif dans le délai imparti pour la négociation !

Une nouvelle fois, la Chambre sociale de la Cour de cassation invente le droit !

En effet, aucun texte ne prévoit que la désignation d’un délégué syndical puisse remettre en cause l’application d’accords conclus conformément à la législation, avant cette désignation.

Étonnante décision, peu commentée, qui en somme révolutionne tout de même le droit de la négociation collective dans les entreprises.

En effet, il faut retenir concrètement de cet arrêt que les accords atypiques ayant pu être conclus avec des délégués du personnel ou avec un comité d’entreprise, en l’absence de délégué syndical et alors même que la législation applicable à l’époque aurait permis la conclusion de tels accords, deviendraient automatiquement caducs dès lors qu’un délégué syndical serait nommé.

La jurisprudence de la Chambre sociale de la Cour de cassation contribue ainsi régulièrement et gravement à l’insécurité juridique tant décriée par les entreprises françaises, insécurité qui constitue un repoussoir supplémentaire aux investissements étrangers.

Contact : jean-marc.sainsard@squiresanders.com