Avis n° 10-11 du 23 juin 2010 de la Commission d’examen des pratiques commerciales (CEPC)

L’article L. 442-2 du Code de commerce prohibe « le fait, pour tout commerçant, de revendre ou d’annoncer la revente d’un produit en l’état à un prix inférieur à son prix d’achat effectif (…) ».

Cette interdiction vise donc uniquement l’activité de revente, ce qui exclut de facto toute activité de vente qui ne fait pas suite à un achat préalable.

En l’espèce la CEPC a eu à s’intéresser au cas d’une opération promotionnelle d’une grande enseigne de distribution qui proposait à tout acheteur des articles mis en avant dans un document publicitaire, un « chèque fidélité » à valoir sur ses prochains achats dans tous les magasins participant à l’opération. Pour bénéficier de cet avantage, le client devait être titulaire d’un compte fidélité sur lequel ce chèque était crédité.

Dans son avis, la CEPC distingue les deux principales façons de concevoir le calcul de l’opération de vente, à savoir l’approche économique et l’approche juridique.

L’approche économique suppose de prendre en compte l’économie générale de l’opération, alors que l’approche juridique aboutit à faire une distinction entre chacune des opérations de vente.

Ainsi, si l’on retient l’économie générale de l’opération, l’achat qui a donné droit à une remise future, s’additionne alors avec celui réalisé par la suite avec le coupon de remise. Il s’agit d’une « opération globale ». Cette hypothèse amène à l’addition des différents montants payés par le client au sein de cette « opération globale » et par conséquent à une réduction des risques de revente à perte.
En l’espèce, la CEPC souligne qu’une telle approche ne peut être retenue du fait que la promotion soumise à la CEPC est une offre divisible. La CEPC conclu donc qu’il faut adopter une approche purement juridique aux motifs que seuls les clients titulaires d’un compte fidélité étaient susceptibles de bénéficier de cette offre, et que même ces derniers pouvaient n’acheter que le produit porteur de l’offre.

La CEPC considère donc qu’une approche juridique doit être appliquée. En effet, deux contrats de vente distincts doivent être conclus, l’un pour la vente du produit qui donnera lieu à l’obtention du chèque de fidélité, et l’autre pour la vente du produit que le client achètera avec ce chèque de fidélité (ou autre système de points).

La CEPC se base pour arriver à cette conclusion, sur le raisonnement de la Cour de cassation dans un arrêt du 29 janvier 2002 selon lequel :

« l’achat de carburant n’imposait pas celui d’un livre et que la remise d’un album était obtenue moyennant le versement d’une somme d’argent, la cour d’appel en a justement déduit que l’obtention de la prime constituait une vente distincte de l’achat de carburant, peu important que sa conclusion soit consécutive à celle du contrat de vente de carburant ».

La CEPC conclut donc que les contrats de ventes doivent en l’espèce s’apprécier séparément. Selon elle, l’avantage présenté au regard du produit en promotion n’a pas à être rapporté au prix de ce produit pour en apprécier une éventuelle revente à perte. Son prix de vente est celui que paiera le consommateur à la caisse du magasin pour l’obtenir. Pour autant que ce prix engendre une marge, le document en cause ne constitue donc pas l’annonce d’une revente à perte.

Quant au délit d’annonce de revente à perte, enfin, la CEPC est d’avis qu’il ne peut être constitué par la seule annonce de l’opération puisque une éventuelle revente à perte d’un tout impliquerait de connaître a priori les articles sur lequel le consommateur fera porter son choix pour bénéficier de l’avantage.