Cette question est d’autant plus sensible que plusieurs textes sont venus récemment encadrer certaines pratiques en droit social des entreprises en difficulté : licenciements collectifs (loi du 14 juin 2013), cession de sites (loi dite « Florange »), et la très récente ordonnance du 12 mars 2014 qui devrait entrer en application au 1er juillet 2014.

Sous la haute présidence du Professeur Michel Germain, plusieurs spécialistes se sont succédés pour tenter de définir les grandes lignes et règles à suivre en la matière.

Monsieur Yves Lelievre, Président du Tribunal de Commerce de Nanterre a regretté l’absence de textes précis et appelé de ses vœux la création d’un droit social des entreprises en difficultés qui manque cruellement aux praticiens modernes.

En matière amiable, aucune obligation n’est imposée aux dirigeants d’informer les IRP tant de l’ouverture du mandat ad hoc que de la conciliation, ni même du résultat des négociations, qu’il s’agisse d’un accord, d’un échec, ou encore d’un constat.

Le représentant du personnel ou du comité d’entreprise ne voit sa présence évoquée qu’au stade de l’audience d’homologation (article L 611-9 du Code de commerce)[1], lorsque les jeux sont faits.

La confidentialité est essentielle et le dirigeant doit être capable de diriger son entreprise tout en maintenant celle-ci. Pour autant, le dirigeant doit veiller à la qualité de la relation sociale et il apparait que si le personnel doit être impacté par l’accord trouvé, il serait préférable de l’en informer (qu’il s’agisse d’un mandat ou d’une conciliation).
Maître Bremond, Avocat, s’est ensuite attaché à mettre en avant la position du praticien confronté aux questions de ses clients faisant face à des difficultés et envisageant de recourir à une procédure amiable (qu’il s’agisse d’un mandat ad hoc ou d’une conciliation).

Si peu de difficultés se posent en cas d’homologation du plan de continuation, la réforme à venir ne devant pas modifier fondamentalement la pratique actuelle, la question de la confidentialité et de l’information des IRP est souvent évoquée en amont, avant l’ouverture d’une procédure.

En matière de mandat ad hoc (le plus souvent ouvert pour renégocier une dette financière) il ne serait pas nécessaire d’informer, ni de consulter le comité d’entreprise ou les représentants du personnel, sauf le cas où la mission confiée à ce professionnel serait de réorganiser profondément l’entreprise ce qui aurait un impact direct sur les salariés; cas d’une cession de branche d’activités ou de la recherche de repreneur.

Proposant une analyse a contrario du nouvel article L611-8-1 du Code de commerce, Maître Bremond a indiqué que si l’information était désormais obligatoire en matière d’homologation, elle ne l’était pas dans tous les autres cas, le système devant demeurer souple et peu contraignant.

Maître Chriqui, administrateur judiciaire, a ensuite plaidé pour une nécessaire transparence sociale et une information au cas par cas, le dirigeant devant s’interroger sur l’existence ou non de restructuration sociale dans le cadre de la procédure amiable.

Il a convenu avec les autres membres de la table ronde qu’une procédure amiable efficace était une procédure confidentielle. Pour autant, et au-delà des textes il a invité les professionnels à associer les salariés aux restructurations pour éviter les tensions (affaire Goodyear) et anticiper au maximum les difficultés.

L’équilibre nécessaire entre confidentialité et information légitime est difficile à trouver selon lui, et la souplesse doit prédominer afin de maximiser les chances de succès de ces procédures.

Maître Chriqui a également souligné le taux d’homologation des conciliations car s’il est de 80% à Nanterre, il est seulement de 15% à Paris, différence susceptible de créer des disparités selon les tribunaux.

Selon lui, à la différence de l’homologation, en phase de conciliation, en cas de constat, aucune information n’apparait nécessaire; sauf encore une fois à ce que les mesures concernent directement les salariés.

L’administrateur est enfin revenu sur le niveau d’information à donner par le dirigeant au management, précisant que les limites étaient souvent difficiles à trouver entre la confidentialité totale et l’ouverture à certains managers, dans l’intérêt de l’entreprise.
Ces interventions ont provoqué de nombreuses réactions de la salle.

Nombre d’intervenants se sont accordés sur la nécessité de maintenir une confidentialité absolue de ces procédures amiables qui, sont aujourd’hui dans de nombreux cas un succès, non pour flouer le droit des salariés, mais au contraire, pour garantir une nécessaire sérénité dans le cadre des débats le plus souvent financiers et complexes.

Nous reviendrons vers vous une fois les décrets d’application de l’ordonnance du 12 mars 2014 publiés pour analyser plus avant les nouvelles obligations mises à la charge des dirigeants dans le cadre des procédures amiables, concernant leurs obligations de communication vis-à-vis des IRP.


[1] Le très récent article L 611-8-1 du Code de commerce inséré par l’ordonnance du 12 mars 2014 prévoit que : « Le Comité d’entreprise, ou, à défaut, les délégués du personnel sont informés par le débiteur par le contenu de l’accord lorsque celui-ci demande l’homologation » ; l’entrée en application est prévue le 1er juillet 2014