Le contentieux lié au respect des délais fixés par le décret Magendie arrive peu à peu devant la Cour de cassation ; et, comme il sera vu ci-après, c’est avec la plus grande rigueur que celle-ci a sanctionné le retard d’un intimé ayant considéré à tort que le point de départ du délai de deux mois était celui de la communication des pièces et non celui de la signification des conclusions.

L’article 909 du Code de procédure civile dispose que :

 « L’intimé dispose, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, d’un délai de deux mois à compter de la notification des conclusions de l’appelant prévues à l’article 908 pour conclure et former, le cas échéant, appel incident ».

L’article 906 du Code de procédure civile dispose que :

 « Les conclusions sont notifiées et les pièces communiquées simultanément par l’avocat de chacune des parties à celui de l’autre partie ; en cas de pluralité de demandeurs ou de défendeurs, elles doivent l’être à tous les avocats constitués ».

S’agissant de la communication « simultanée » des pièces, la Cour de cassation a fait preuve de souplesse en admettant, dans un arrêt du 30 janvier 2014 (pourvoi n° 12-24.145), que le terme « simultané » peut être entendu comme « en temps utile ».

Cette tolérance de la Cour de cassation a ainsi permis aux avocats moins diligents que d’autres qui, pour des raisons qu’on espère matérielles, communiquaient leurs pièces près d’un mois après leurs conclusions, de ne pas être sanctionnés et de bénéficier de ce « temps utile ».

Mais « utile » pour qui ?

Manifestement pas pour l’intimé qui, ayant reçu des conclusions au soutien desquelles venait un certain nombre de pièces, a estimé ne pouvoir prendre utilement des conclusions en réponse qu’après analyse desdites pièces. Imaginant, peut-être un peu naïvement, que la Cour de cassation ferait preuve de la même tolérance, l’intimé a considéré que le délai de deux mois pour ses conclusions en réponse ne commençait à courir qu’à compter de la communication des pièces, intervenue un mois après la signification des conclusions. La Cour de cassation ne l’a toutefois pas entendu de cette oreille puisqu’elle rappelle que le délai de deux mois de l’article 909 du Code de procédure civile commence à courir au jour de la signification des conclusions d’appelant.

Cet arrêt mérite plusieurs observations :
– tout d’abord, la rigueur de la Cour de cassation peut étonner quand on connaît sa position plus souple sur la question de la communication de pièces dès lors que la solution adoptée favorise l’avocat ayant fait preuve de moins de diligence en ne communiquant ses pièces qu’un mois après ses conclusions ;
– par ailleurs, cette position inflexible de la Cour de cassation peut confiner à une forme d’illogisme puisqu’elle contraint ainsi l’intimé à répondre dans un délai plus court que celui imparti voire à conclure en réponse sans avoir eu communication ou pu prendre connaissance en temps utile des pièces adverses.
  En réalité, la solution de la Cour de cassation s’inscrit dans l’objectif du respect des délais et de célérité, poursuivi par le décret Magendie ; il serait toutefois utile que, dans cette même perspective, la Cour de cassation ait une interprétation un peu plus stricte du terme « simultané » qui ne saurait avoir pour synonyme un délai d’un mois.

Au total, le meilleur conseil que nous pourrions donner est de signifier, coûte que coûte, des conclusions au fond dans le délai imparti (3 mois à compter de la déclaration d’appel, 2 mois à compter des conclusions d’appelant ou des conclusions d’appel incident de l’intimé) ; l’avocat sera toujours à temps de modifier ses écritures avant la clôture des débats et après communication des pièces par son adverse.

Contact : stephanie.simon@squirepb.com