Le numéro 4-2012 de la Revue de l’Arbitrage, publié par le Comité Français de l’Arbitrage, est paru. Vous y lirez plusieurs contributions sur la sociologie de l’arbitrage – acte de la journée d’étude du CFA du 21 juin 2012.

L’introduction est du Professeur Jean-Baptiste Racine qui évoque la marchandisation de l’arbitrage, suivie d’un article de Jean-Pierre Ancel, Président de chambre honoraire à la Cour de cassation. En apparence, l’arbitre est un juge dont les exigences de légitimité, d’indépendance, d’autorité et de rationalité sont remarquables. L’arbitre n’est pas acteur de l’ordre juridique. Jean-Pierre Ancel décrit le juge comme un « oracle ventriloque » et l’arbitre comme un « prophète aphone ». Chacun pensera ce qu’il veut.

Le Professeur François-Xavier Train enchaine sur le thème « Mode d’exercice de l’activité d’arbitre et conflits d’intérêts ». Il observe que le mode d’exercice de l’activité d’arbitre est par nature occasionnel, mais en réalité nombreux sont les arbitres qui exercent l’arbitrage à temps plein. Un arbitre dont l’activité s’exerce à titre principal est-il encore dans son rôle et est-il différent du magistrat fonctionnaire ? Le Professeur Train évoque l’arbitrage « corporatif », mais ne développe pas cette notion.

Séverine Menétrey, Professeur à l’Université du Luxembourg, traite du « Réseau associatif : un exemple de marketing arbitral ». Elle s’interroge sur la manière dont le monde de l’arbitrage s’organise et se promeut. Les associations – comme le Comité Français de l’Arbitrage par exemple – mais également les centres d’arbitrage internationaux comme la CCI, le CEPANI ou encore la LCIA font du marketing, voire de la publicité pour l’arbitrage. Imaginez qu’un magistrat de l’ordre judiciaire fasse de la publicité. Une certaine compétition s’exerce toutefois entre tribunaux étatiques. Il est question du « réseau associatif » qui « fonctionne en autopoïèse ce qui est assez surprenant » dit-elle « pour un réseau, mais ce qui l’est moins dès lors que l’on comprend que ce réseau a une fonction unique ou commune ». « Autopoïèse » (provient du grec pour (auto) soi et (poïèse) création, joli mot en vérité qui désigne la propriété d’autocréation d’un système par lui-même en interaction avec son environnement, à ne pas confondre avec l’autoreproduction.

Nous avons déjà mentionné dans La Revue que les tribunaux des Pays-Bas permettent aux justiciables qui le souhaitent de plaider en anglais. Depuis des décennies, les tribunaux helvétiques attirent des procès internationaux à l’instar des tribunaux new-yorkais.

Les travaux du Comité Français de l’Arbitrage sur la sociologie de l’arbitrage sont enrichis par une étude de Sophie Harnay, maître de conférence à l’Université de Paris Ouest « Réputation de l’arbitre et décision arbitrale : quelques éléments d’analyse économique ».

Georges Decocq, Professeur à la Faculté de Droit de Paris Est Créteil, traite de « L’influence d’Internet sur la pratique de l’arbitrage ». Il constate qu’Internet abolit l’espace et limite les déplacements, ce qui se traduit par des gains financiers importants.

Le dernier article est de Charles Jarrosson sur « L’acceptabilité de la sentence ». Il remarque que rendre une sentence acceptable est tout un art.

Comme il se doit, la Revue de l’Arbitrage poursuit avec sa chronique habituelle française et étrangère. Detlev Kuner, ancien conseiller de la CCI et avocat au Barreau de Paris, rend compte d’un arrêt de la Cour d’appel de Paris (Pôle 1 – Chambre 1) du 20 mars 2012 sur la validité d’une clause compromissoire désignant un centre d’arbitrage qui n’existe plus. La clause a été jugée valable, l’arbitrage ayant pu valablement avoir eu lieu sous l’égide de l’institution DIS qui a succédé à la commission allemande d’arbitrage DAS (quel est le sort d’une clause d’arbitrage visant une institution d’arbitrage qui n’existe plus en tant que telle ?).

On apprendra enfin que le prix Philippe Fouchard a été décerné à Madame Magali Boucaron-Nardetto pour sa thèse « Le principe compétence – compétence en droit de l’arbitrage » par un jury composé du Professeur Daniel Cohen et Messieurs Gérard Plueyette, Jacques Pellerin, Jean-Baptiste Racine et François-Xavier Train et que le Convention de New-York a été ratifiée par la République de Sao Tomé-et-Principe sans réserve. La Convention de New-York compte désormais 148 États signataires. On fêtera bientôt les 150.