CJCE, 13 juillet 2006, GAT c/Luk.n°C-4/03

La Convention de Bruxelles remplacée par le Règlement communautaire n°44/2001 du 22 décembre 2000, relatif aux règles de compétence communautaire, prévoit une compétence exclusive en faveur des juridictions de l’Etat ayant délivré le brevet s’agissant de la validité d’un brevet.

Dans un arrêt du 13 juillet 2006, la CJCE a décidé que cette compétence exclusive s’applique aux actions en nullité de brevets soulevées par voie d’action (à titre principal, par le biais d’une action spécifique en nullité), ou bien par voie d’exception (par voie reconventionnelle, à titre de défense par le prétendu contrefacteur dans un litige en contrefaçon).

Rappelons que cette règle de compétence est d’ordre public et ne peut donc donner lieu à dérogations par les parties à un contrat portant sur un brevet.

CJCE, 13 juillet 2006, Roche c/Primus n°C-539/03

Dans le cadre d’un procès en contrefaçon de brevet mettant en cause plusieurs filiales d’un même groupe présentes dans plusieurs Etats membres, la CJCE a jugé que la juridiction de l’Etat de la société-mère n’était pas compétente pour connaître de l’ensemble du litige.

Les litiges en contrefaçon de brevet comprennent souvent plusieurs éléments d’extranéité, ce qui rend les procédures complexes et coûteuses.

Si le brevet européen permet un dépôt unique auprès de l’OEB (Office Européen des Brevets), celui-ci donne en réalité naissance à des brevets nationaux soumis à leur propre droit, car il n’existe pas encore, à ce jour, de brevet communautaire soumis à une même réglementation. Dès lors, un litige en contrefaçon portant sur un brevet européen oblige souvent le titulaire à porter son action devant plusieurs juridictions différentes (en fonction de la nationalité des parties poursuivies, mais aussi du lieu de contrefaçon) qui appliqueront leurs règles nationales. Afin d’éviter la lourdeur de ce mécanisme, certaines juridictions européennes, dans le cadre d’un procès en contrefaçon de brevet mettant en cause plusieurs filiales d’un même group, présentes dans plusieurs Etats membres, avaient reconnu la compétence unique des juridictions de l’Etat de la société-mère, ce qui évitait la multiplication des procédures.

La CJCE a mis un terme à cette solution dans un arrêt du 13 juillet 2006 : considérant que les filiales sont des entités différentes, relevant d’Etats membres différents, et que les brevets sont soumis à des règles différentes, elle a jugé que la juridiction de l’Etat de la société mère (en l’occurrence, les Pays-Bas) n’était pas compétente pour connaître de l’ensemble du litige. Cette solution, qui a l’inconvénient pour les titulaires de droits d’alourdir la procédure et d’en augmenter les coûts, a pour objectif d’éviter la pratique du "forum shopping" au sein de l’Union européenne en matière de contrefaçon de brevet.

La création du brevet communautaire aurait l’avantage de mettre un terme à ces difficultés. Toutefois, il n’existe pas actuellement de consensus suffisant sur le brevet communautaire qui apparaît beaucoup trop cher à beaucoup d’entreprises. L’impasse actuelle en la matière a conduit la Commission européenne à lancer en 2006 une large consultation sur le sujet dont les résultats ont été publiés en juillet dernier. Si la majorité des acteurs sont pour l’adoption du brevet communautaire, des divergences demeurent, notamment sur les modalités d’enregistrement (langues) et sur l’autorité compétente en matière de litiges.