Cass. Soc. 6 février 2013 n° 11-23.738

Dans un arrêt du 6 février 2013 (Cass. Soc. 6 février 2013, n° 11-23.738), la chambre sociale de la Cour de cassation autorise désormais le cumul de l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé et des indemnités de licenciement (cf. article précédent) mais permet également explicitement à un salarié d’utiliser la retranscription d’un message vocal comme moyen de preuve loyal pour prouver qu’il a fait l’objet d’un licenciement verbal.

Il résulte en effet de la jurisprudence que le licenciement verbal est sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 6 mai 2009 n°08-40.395).

En l’espèce, le salarié soutenait avoir fait l’objet d’un licenciement verbal un mois avant de s’être vu notifier par écrit un licenciement pour faute grave.

Pour prouver ses allégations, le salarié avait produit un procès-verbal dressé par un huissier de justice qui avait retranscrit les termes des messages téléphoniques laissés par son employeur sur la boite vocale de son téléphone portable.

Pour se défendre, l’employeur soutenait que même si l’auteur ne peut ignorer que le message vocal est enregistré par l’appareil récepteur, dans l’esprit de son auteur, il n’a pas vocation à être conservé. Il en résulte que ce mode de preuve est déloyal et de ce fait irrecevable (article 6 du Code civil et 9 de la CEDH).

En se plaçant sur ce terrain, l’employeur souhaitait que la Cour transpose aux messages vocaux la jurisprudence existante en matière de recevabilité de la preuve selon laquelle l’enregistrement des conversations téléphoniques privées est irrecevable si l’auteur des propos n’a pas été préalablement averti de sa mise sur écoute (Cass. 2ème civ. 7 octobre 2004, n° 03-12.653 – Cass. soc. 29 janvier 2008, n° 06-45.814).

L’employeur ajoutait qu’en tout état de cause la Cour avait dénaturé les termes des propos retranscrits puisque le procès-verbal ne faisait qu’établir qu’il avait demandé au salarié de quitter le magasin dans la journée du 24 décembre 2009 parce qu’il était « impossible de faire Noël » avec ce dernier. Il concluait que la retranscription du message n’établissait pas la preuve manifeste d’une volonté « claire et non équivoque » de rompre le contrat de travail, le mot « licenciement » n’ayant pas été prononcé et l’employeur lui ayant, a posteriori, demandé de reprendre son travail dès le lendemain !

Cependant, la Cour de cassation a décidé que « c’est par une interprétation exclusive de dénaturation des retranscriptions des messages vocaux laissés par l’employeur sur le téléphone mobile du salarié que la cour d’appel a retenu […] qu’il était établi que le salarié avait été licencié verbalement le 24 décembre 2009 ».

Cet arrêt transpose donc aux messages vocaux, la jurisprudence dite SMS (Cass. soc. 23 mai 2007, n°06-43.209) selon laquelle l’auteur de messages textes/vocaux « ne peut ignorer qu’ils sont enregistrés par l’appareil récepteur » et ne peut donc pas se prévaloir du caractère clandestin et/ou déloyal de la retranscription.

Contrairement aux conversations téléphoniques privées, la retranscription des messages vocaux/textes n’est pas un procédé déloyal et constitue donc un mode de preuve parfaitement recevable.

Ainsi, c’est avec la plus grande prudence qu’un employeur doit s’adresser à son salarié lorsqu’il décide de lui laisser un message vocal/texte, car les termes utilisés et le ton employé peuvent permettre d’en tirer des conséquences qui vont au-delà des intentions de son auteur au moment de l’enregistrement/l’envoi du message.

A l’instar du salarié qui peut ainsi établir en justice les faits qu’il reproche à son employeur, ce dernier peut également se prévaloir de messages vocaux/textes laissés par des salariés qui ont commis des faits susceptibles d’être sanctionnés disciplinairement (insulte, dénigrement, insubordination…).